Projet Xpe-GE
Le projet Xpe-GE vise à évaluer les performances de systèmes de cultures en très fortes réduction d’utilisation de produits phytosanitaires dans les contextes de grandes cultures et de polyculture-élevage de la région Grand Est.
Le territoire agricole du Grand Est est représenté par une diversité de pédoclimats et de systèmes agricoles, avec des contraintes et des atouts propres à chaque territoire, impliquant des consommations de produits phytosanitaires variables sur la région. Le changement du climat et l’intensification de ses aléas, l’évolution des résistances des ennemis des cultures aux produits phytosanitaires et la demande sociétale d’une agriculture moins polluante sont malgré cela des enjeux partagés de l’Alsace aux Ardennes en passant par la Lorraine et la Champagne.
D'autre part, la réflexion sur ce nouveau projet s’est également appuyée sur les réflexions menées par les groupes DEPHY mettant en avant deux thématiques complémentaires correspondant à leurs projets collectifs :
- La qualité des sols s’impose comme un des enjeux essentiels pour de nombreux agriculteurs, posant à la fois la question du travail du sol, de la moindre dépendance aux fertilisants minéraux, de l’introduction des légumineuses, de la gestion des restitutions organiques et des régulations biologiques.
- L’autonomie des systèmes de polyculture-élevage devient une thématique prégnante pour construire des systèmes plus durables. En effet, on constate que l’efficience des systèmes de polyculture élevage est finalement très rarement validée. La recherche d’autonomie vis-à-vis des intrants et la diversité de systèmes de culture permise sont autant de facteurs déclenchants forts permettant d’attirer l’attention sur les systèmes en polyculture élevage : des systèmes porteurs d’agro-écologie et source d’une utilisation raisonnée des produits phytosanitaires en ultime recours.
Enjeux et objectifs
Faisant suite au projet EXPE Lorrain conduit de 2012 à 2017, les objectifs de ce nouveau projet visent à répondre aux enjeux partagés sur l'ensemble de la région Grand Est, qu’ils soient très techniques ou plus sociétaux.
La place des produits phytosanitaires dans les pratiques agricoles est au coeur des enjeux sociétaux, et c’est une raison supplémentaire qui justifie l’élargissement du partenariat pour tester dans différents contextes une réduction drastique des produits phytosanitaires, allant jusqu’au 0 phyto. Cette approche de suppression des produits phytosanitaires se positionne très en rupture avec les systèmes actuels et vise plusieurs attentes :
- Répondre à une demande d’agriculteurs qui ne sont pas prêt à passer à l’Agriculture Biologique pour des raisons de fertilité des sols en conservant le levier fertilisation minérale.
- Tenter de mettre en exergue des innovations que l’on ne capte pas dans des systèmes dans lesquels la chimie est encore utilisable (va-t-on vraiment au bout des choses lorsque l’on s’autorise une « petite » intervention insecticide par exemple ? quid de la régulation naturelle ?).
- Anticiper des évolutions réglementaires et techniques inexorables qui risquent de remettre en cause les systèmes actuels si celles-ci ne sont pas travaillées en amont (exemple du glyphosate).
- Initier une réflexion vers une filière répondant à une demande sociétale, puisque la valeur ajoutée de ce mode de production devra nécessairement être rémunérée.
La réponse aux enjeux techniques des systèmes de cultures du Grand Est doit s’accorder avec ces deux enjeux de réduction de l’usage des produits phytosanitaires et de performances économiques pour les systèmes. Aussi parmi les objectifs techniques affichés pour ces travaux, certains sont aussi partagés dans tous les systèmes de cultures du Grand Est :
- La gestion des graminées : cette problématique reste l’enjeu technique majeur des systèmes basés sur les céréales et le colza.
- La place du colza dans la rotation et dans le territoire, lié à la fois aux enjeux techniques (apparition des insectes résistants, maitrise du désherbage compliquée, soucis d’implantation), mais aussi aux enjeux d’évolutions de marché.
Stratégies testées
Une des forces du projet est la diversité de dispositif proposé :
- trois plateformes d’essais de type « expérimentation » :
- HAROUE : expérimentation pilotée par la CRAGE, avec appui de Terres Inovia. Présence de tous les termes de la rotation chaque année sur des bandes de 24m x 80m. 4 bandes équipées avec des cases lysimétriques. Sur la ferme école de l’ALPA en sols argilo-calcaires profonds du sud du plateau de Haye. 2 systèmes de cultures (Agriculture de Conservation des Sols sans glyphosate et 0 phyto) sont évalués sur une nouvelle plateforme en comparaison d’un système de référence PIC.
- FLIREY : expérimentation pilotée par EMC2 avec tous les termes de la rotation présents chaque année sur des bandes de 30m x 90m. Sur une exploitation céréalière en sols argilo-calcaires moyens du plateau lorrain. 2 systèmes de cultures en conduite intégrée avec une utilisation des phytosanitaires en dernier recours sont testés dans la continuité de la précédente plateforme.
- SOMME-VESLE : expérimentation pilotée par la Chambres Départementales d'Agriculture (CDA) de la Marne avec tous les termes de la rotation chaque année sur des parcelles de 300m x 100m. Sur la ferme école du lycée de Somme-Vesle en sols de craie. Un système de cultures en rupture 0 phyto en rotation sur 8 ans avec intégration de la betterave.
- un réseau de 12 parcelles chez des agriculteurs sous forme « d’observatoires pilotés », pilotés par les CDA impliquées dans le projet. Ces sites apportent une véritable valeur ajoutée aux plateformes expérimentales, permettant de multiplier la diversité des situations pédoclimatiques et de contraintes d’exploitation, et de se confronter aux décisions prises par les exploitants pour parvenir à cet objectif de 0 phyto.
- une exploitation de polyculture-élevage conduite sous forme « d’observatoire piloté », dans une démarche d’observation de systèmes très exploratoires dont les règles de décision ne sont pas figées. Cet observatoire piloté correspond à la ferme expérimentale d’Arvalis à ST HILAIRE EN WOEVRE associant plusieurs systèmes de cultures, de la prairie permanente, un troupeau de vaches allaitantes et un atelier d’engraissement de jeunes bovins.
Résultats attendus
Le partenariat historique du projet avait été construit dans une logique de transfert des résultats des travaux à destination des agriculteurs, futurs agriculteurs, conseillers et futurs conseillers. L’élargissement du partenariat vers les Chambres Départementales consolide cette logique et l’étend sur le territoire Grand Est. Et si cet objectif de transfert a largement été rempli dans le précédent programme, associant notamment les ingénieurs et les agriculteurs DEPHY lors de différentes visites et/ou travaux autour du projet EXPE lorrain, la réflexion sur le nouveau projet s’est également appuyée sur les réflexions menées par les groupes DEPHY mettant en avant deux thématiques complémentaires correspondant à leurs projets collectifs, la fertilité des sols et l'autonomie des systèmes.