Marie MENELLA, représentante CFDT dans les instances paritaires nationales

Intervention de Marie pour la CFDT au premier conseil d’administration du CNFPT du 31 janvier 2024 sur la question du climat social dans la fonction publique territoriale et l’appel à manifestation du 19 mars.

Une intervention un peu particulière aujourd’hui, car le syndicalisme est bousculé depuis quelques semaines et il mérite d’être défendu. En effet, le monde agricole se soulève, les agriculteurs ont une colère dite « légitime » qu’ils expriment par des manifestations, des grèves, des blocages, des incendies criminels, des dégradations de biens publics ou privés, des violences, des vols, des troubles manifestes à l’ordre public sous le regard bienveillant du Gouvernement.

Alors oui, notre société est malade de ces révoltes permanentes qui ne sont pas comprises, de ces colères qui ne sont pas entendues et de cette fatalité ambiante qui voudrait que l’on regarde les manifestants d’un œil vaguement curieux, au mieux, voire agacé la plupart du temps. La fracture sociale est à l’œuvre, chacun se bat dans son pré carré.

Et le Gouvernement dans tout ça ? Il réprime la colère lorsqu’elle n’est pas légitime, le deux poids deux mesures que nous subissons en tant qu’organisations syndicales devient ridicule et la tournure politique des manifestations de l’entrepreneuriat agricole est un cirque qui est tout sauf du syndicalisme. Il faudrait parler de corporatisme.

Et la Fonction publique, me direz-vous ? La Territoriale dans tout ça ? Des appels à la grève et aux manifestations se multiplient, dans la petite enfance, chez les policiers municipaux (3 février dernier), etc… Là aussi, la tension monte.

Après tant d’effort pour expliquer le manque d’attractivité, d’études, de chiffres, la Fonction publique est mal payée et la Territoriale, encore plus. Il n’y a même plus de débat là-dessus. Quelles réponses donne le Président ?

Première réponse : « On va vous rémunérer au mérite ». Ce qui veut dire que les agents ne seront pas mieux rémunérés ! Que veut-il avoir au final : une Fonction publique de valeur et d’enthousiasme ou des salariés qui servent un élu et pas un territoire et des citoyens ?

Deuxième réponse : « On va simplifier ! » Eh oui, moins de règles, c’est bon pour les employeurs, mais attention, ces règles dans la Territoriale protègent aussi les agents. La simplification, on n’a plus que ce mot à la bouche. On ne veut plus de normes, mais les normes protègent, elles garantissent l’équité, l’égal accès, l’unité. Notre plus belle norme reste le statut de la Fonction publique. La simplification « c’est peut-être son projet (!) », mais ce n’est justement pas une politique.

Enfin, pour terminer, un mot sur le dialogue social. Toute discussion sur la rémunération doit être le fruit d’un dialogue social entre ceux qui payent et ceux qui sont payés. De quoi parle-t-on lorsque l’on parle de mérite ? Quels critères utilise-t-on pour le calculer ? Le mérite social ? L’utilité sociale ? Le rapport entre le service rendu à la population et le coût de la personne ? Quid du mérite et l’égalité professionnelle ? N’y-a-t-il pas une antinomie ? Quel mérite auront les femmes qui travaillent dans la précarité ? Quel mérite lorsqu’on est sur un temps non complet au ménage en CDD ? On ne mérite pas déjà de gagner sa vie ? Et le Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT) dans tout ça ?

L’offre de service du CNFPT doit être en cohérence avec les transitions et les attentes de notre société. Le CNFPT a un rôle de cohésion sociale, d’écoute des territoires et des agents.

Pour cela, le dialogue social doit y avoir une place prépondérante, car le dialogue social, ça se pratique et ça s’apprend. Ce n’est pas une somme de règlementations à appliquer, c’est une culture qu’il faut déployer et faire vivre dans nos collectifs de travail et sur nos territoires. Écouter sa population… Et si on commençait par écouter ses agents ?

Et les organisations syndicales dans tout ça ? Nous défendons les travailleurs afin de garantir leurs droits et d’en acquérir de nouveaux. Notre but est de faire vivre le dialogue social. Plutôt que le Flash-Ball, utilisons le dialogue comme réponse au climat de tension que nous vivons. Encore faut-il être écouté. Et par qui ? Où sont nos ministres 1 ?

Pour toutes ces raisons, pour se faire entendre, pour déclencher une prise de conscience et obtenir des échanges constructifs avec le futur ministre, l’ensemble des organisations représentatives font un appel unitaire à la grève et à manifestation le 19 mars prochain pour un salaire décent pour toutes et tous, pour une rémunération juste et respectueuse des hommes et des femmes qui sont au service de la population et des territoires, et pour retrouver le pouvoir de vivre de notre travail.

1 Depuis cette intervention, la liste complète des 34 ministres du nouveau Gouvernement a été annoncée le 8 février, un mois après la nomination du Premier ministre, le 9 janvier 2024.

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